par Pascal Jacob
La danse de corde puise ses références dans l’Antiquité quand neurobates et oreibates se produisent à l’occasion de fêtes populaires ou de célébrations religieuses. Courses et ascensions sur la haute corde sont les éléments forts d’un répertoire qui ne cesse de s’enrichir. Avec l’avènement du fil d’archal, un alliage à base de laiton, la pratique se complexifie et un nouveau vocabulaire se développe rapidement, porté notamment par les innovations techniques qui contribuent à multiplier figures et écriture spectaculaire.
Fil tendu, fil souple, fil à grande hauteur, corde élastique ou dynamique, structure à fils multiples, barre courbe suspendue entre deux supports semblables à ceux des fildeféristes classiques, fils croisés ou fils superposés, la diversité des agrès est à l’image des possibilités d’écriture associées à une discipline très particulière. Les références à la danse sont explicites et le travail sur les pointes est récurrent depuis le XVIIIe siècle. Pratique plutôt individuelle lorsqu’il s’agit d’un fil à moins de deux mètres du sol, elle peut devenir collective dès lors qu’elle se déploie à grande hauteur. Les troupes de funambules, notamment en Europe centrale entre la fin du XIXe siècle et le début des années 1930 et dans les Démocraties Populaires à partir des années 1950, sont bien plus nombreuses que de très rares compagnies de fildeféristes. Le fil possède une dimension symbolique, nourrie notamment par la pensée Nietzschéenne qui identifie le surhomme comme un funambule au-dessus de l’abîme. Cette idée contribue à la mise en œuvre d’un réseau d’émotions différentes pour le spectateur selon le type de technique valorisé. Tour à tour purement démonstratif et conçu comme un simple enchaînement virtuose de sauts, le travail sur le fil est aussi prétexte à l’écriture d’une forme mono-disciplinaire, qu’il s’agisse des pantomimes du début du XIXe popularisées par des acrobates comme la Malaga ou madame Saqui ou de créations contemporaines à l’instar des spectacles de la compagnie Les Colporteurs.